mercredi 22 janvier 2014

Penser la ville et panser la non ville : une politique de gauche.

La campagne des municipales est toujours un temps privilégié pour penser la ville, son futur, son présent, son passé. Il y a longtemps que les évolutions urbaines à l’œuvre ont montré que ce qui fait ville ce n’est pas la forme mais la fonction et l'action. Autrement dit, que la densité humaine en un lieu ne suffit pas à créer de la ville ou de l'urbanité. Et parce qu'aujourd'hui l'urbanité sort des limites de la ville, il  y a urgence à repenser la ville pour l'empêcher d'être non-ville. La ville est historiquement ce lieu qui procure liberté, concilie relation sociale et solitude, proximité et distance. C'est un lieu multifonctionnel, délimité et définit par ses relations avec un au-delà. Les évolutions économiques, sociales et urbanistiques ont paradoxalement étalé les villes jusqu'à créer des zones urbaines de non-villes (dénuées de fonctions urbaines hors le logement) et créé une urbanité hors la ville, via les phénomènes de mondialisation, d'hyper mobilité et de connexions. D'où l'émergence de territoires qui ressemblent à la ville, sans l'urbanité et de territoires qui ressemblent à la campagne mais remplis d'urbanité.  (Lire à ce sujet les travaux de F. Choay, D. Pumain ou P. Virilio, géographes ou philosophes)
Qu'observe-t-on à Clamart comme dans beaucoup de commune de banlieue parisienne? La coupure effective sur la forme et sur certaines fonctions urbaines entre un haut-Clamart récent et un bas Clamart qualifié de village (ce n'est pas sans arrière-pensées idéologiques et de représentations) plus ancien.
Très longtemps, la fracture a été soigneusement entretenue par conviction ou par négligence. Les programmes qui s'affrontent aujourd'hui sur la commune sont de ce point de vue à analyser avec soin. Si l'on s'intéresse au  programme Berger, le raisonnement entre centre et périphérie, notamment en matière de logements  relève d'une conception morphologique de la ville passéiste et discriminatoire : réservant au seul centre-ville (entendez le bas Clamart) les fonctions qui font l'urbanité d'aujourd'hui et aux "périphéries" des fonctions subalternes de logements : ce faisant c'est une ville de la discontinuité et de l'inégalité qui se profile.
L'enjeu  au contraire est de créer des centralités nouvelles dans les périphéries actuelles, de réduire les fractures  tant morphologiques (lorsque c'est possible)  que sociales et fonctionnelles pour donner aux quartiers de non-villes les fonctions d'une urbanité du XXIème siècle.
Sur le plan morphologique, que propose-t-on à Clamart ? Le maintien de quartiers pavillonnaires à densité relativement faible. C'est effectivement un des enjeux patrimoniaux  importants. Néanmoins, refuser toute implantation de logements collectifs sur ce seul motif, c'est assumer le renforcement de fractures sociales majeures et dangereuses pour la ville, qui se doit d'être un espace d'interaction et non de simple cohabitation d'entre-soi soigneusement délimités par des PLU complices. L'argument patrimonial a bon dos mais risque à terme de créer la ville figée et endormie dans une éternité illusoire.
Les programmes qui feront en sorte de panser les zones de non-villes et de faire en sorte que le territoire soit tout entier un territoire d'urbanité avec sa cohérence et ses respirations, ses différences morphologiques, certes, mais réunies dans une logique d'ensemble, celui-là alors, aura réussi à penser la ville.
Force est de constater que c'est la gauche (et en évoquant la gauche j'englobe à dessein les deux listes en présence, qui ont toute deux une légitimité à se présenter) qui s'est emparé de ces problèmes à Clamart en rénovant des zones abandonnées à la contingence des fractures urbaines, en augmentant les espaces verts, en liant les quartiers par de nouvelles connectivités, en créant des pôles de centralité (notamment en matière culturelle) ailleurs qu'au centre historique. C'est la gauche encore qui s'est efforcé de rééquilibrer socialement et morphologiquement une ville qui en formait deux ou trois...C'est la gauche qui s'est efforcé de penser la ville à une échelle qui dépasse les limites communales même si en matière d'intercommunalité et de Grand Paris, il y a beaucoup à dire (voir à ce sujet l'article Grand Paris et petits élus)...
Nous aurons sans nul doute l'occasion de débattre de toutes ces questions à de nouvelles reprises!


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